Portraits et souvenirs

On dirait qu'il s'est écoulé un siècle depuis le temps où j'écrivais Harmonie et Mélodie, «Harmonie,» alors, signifiait science; «Mélodie,» inspiration. La situation s'est retournée; les amateurs qui refusaient de tenter le moindre effort pour comprendre la musique se sont pris de passion pour l'obscur et l'incompréhensible; «quand je comprends,» disent les purs, «c'est que cela est mauvais; quand je ne comprends pas, c'est que cela est bon». Ils sont irrités ou dédaigneux si les instruments de l'orchestre ne courent pas de tous côtés comme des rats empoisonnés; un accompagnement simple et naturel leur fait hausser les épaules. La Mélodie, naguère objet d'une redoutable idolâtrie, est vilipendée; un simple chant, accompagné naturellement, semble méprisable, et dans les compositions dépourvues de cet élément, on prétend que la mélodie est «partout». Quelle plaisanterie! Nous connaissions cela, à l'école, quand on nous apprenait à écrire des fugues où les diverses parties doivent être chantantes et vivre d'une vie propre, tout en concourant à l'ensemble; c'est ce qui constitue le style horizontal en opposition avec le style vertical en accords plaqués. Ce n'est pas là de la mélodie. Le gros public, heureusement, est resté naïf, et peu lui importent les systèmes, pourvu qu'on réussisse à l'intéresser. On trouvera un peu de tout dans ce volume et beaucoup moins de polémique ici que dans Harmonie et Mélodie. Des anecdotes, des souvenirs sur quelques grands musiciens que j'ai connus, un peu de critique générale. Quant à de véritables mémoires, je n'en écrirai jamais.

Charles Camille Saint-Saëns, né le 9 octobre 1835 à Paris et mort le 16 décembre 1921 à Alger, est un pianiste, organiste et compositeur français de l'époque romantique. Il a écrit douze opéras, dont le plus connu est Samson et Dalila (1877), de nombreux oratorios, cinq symphonies, cinq concertos pour piano, trois pour violon et deux pour violoncelle, des compositions chorales, un Requiem, un Oratorio de Noël, de la musique de chambre et des pièces pittoresques, dont Le Carnaval des animaux (1886). De plus, il occupe une place particulière dans l'histoire du cinéma puisqu'il est, en 1908, le tout premier compositeur de renom à composer une musique spécialement pour un film, L'Assassinat du duc de Guise.

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